7 décembre 1860 à Couthures-sur-Garonne (Lot-et-Garonne) – mort pour la France le 4 novembre 1918 à La Neuville-aux-Joûtes (Ardennes).
Originaire d’une famille paysanne catholique de Basse Garonne, Jean Lagardère est le fils de Pierre Lagardère, métayer, et de Marie Vigneau, cultivatrice[1]. Se destinant au sacerdoce, il intègre le séminaire d’Agen jusqu’à son ordination effective le 5 juin 1887. L’abbé Lagardère est ensuite nommé professeur de mathématiques au collège de Saint-Caprais à Agen. En 1889, il devient élève du Séminaire français à Rome. Trois ans plus tard, il rentre en France muni de son doctorat en théologie et du doctorat en droit canon. Il est nommé à l’aumônerie du Carmel en novembre 1894 puis chanoine honoraire de la métropole de Besançon en 1901. Dans cette même ville, il officie comme secrétaire particulier de Monseigneur Fulbert Petit et dirige les œuvres du diocèse de Besançon. Constatant la montée du féminisme, il fonde et dirige la revue féministe catholique La Femme contemporaine, lancée en octobre 1903[2]. Ce projet découle d’une série de conférences en France et à l’étranger, et de ses échanges avec les femmes du monde. En 1911, il est aumônier-conseil de la Ligue patriotique des Françaises à Besançon[3]. Le 2 août 1914, âgé de cinquante-trois ans et dégagé des obligations militaires, il sollicite tout de même un poste d’aumônier militaire sur le front[4]. Il est rapidement rattaché à la 8ème division de cavalerie. Le 24 novembre 1914, il est cité à l’ordre de l’armée : « Souvent réclamé par des blessés, s’est toujours porté immédiatement près d’eux, la nuit comme le jour, aux tranchées de première ligne sous un feu parfois violent, prodiguant à tous ses secours avec un dévouement absolu »[5]. Le 6 octobre 1915, il prononce un discours sur la doctrine de l’expiation dans lequel il fustige les erreurs morales de la France commises avant la guerre. Des journaux anticléricaux en profitent pour déclencher une polémique tandis que La Croix et L’Action française défendent son raisonnement théologique[6]. Le ministre de la Guerre, Joseph Gallieni, diligente une enquête disciplinaire et le condamne à quinze jours d’arrêts le 10 novembre 1915. En août 1916, il sert dans le 11ème secteur comme infirmier militaire à la 8ème DI[7]. Il sert plus tard auprès du 115ème RI. En 1917, l’abbé Lagardère est salué d’une deuxième citation : « Aumônier d’un courage et d’un dévouement admirables, se dépensant sans compter. Durant la période du 25 juin au 20 juillet 1917, n’a cessé sous les bombardements les plus violents de parcourir le secteur, le jour et la nuit, apportant aux soldats jusqu’à la première ligne l’encouragement de sa présence et visitant les divers postes de secours, notamment les 14 et 15 juillet où il a aussi apporté à de nombreux blessés le réconfort de sa parole et les secours de la religion ». Pendant le conflit, il est également distingué de la croix de guerre. Le 25 août 1918, il reçoit une troisième citation sur le champ de bataille : « Dégagé par son âge de toute obligation militaire, est parti comme aumônier dès le début des hostilités. Fait preuve dans l’exercice de son ministère d’un dévouement, d’une abnégation, d’une bravoure, qui lui ont valu, l’admiration de tous. Donne un bel exemple d’énergie et de confiance dans le succès final ». Le 4 novembre 1914, il est gravement blessé aux environs de Château-Porcien (Ardennes). Sur son lit de mort, le maréchal Pétain lui remet la croix de chevalier de la Légion d’honneur avec la citation suivante : « Aumônier catholique de la plus haute valeur morale. A tenu à demeurer au front depuis le début des hostilités, quoique par son âge dégagé de toute obligation militaire. A toujours prodigué avec le plus admirable dévouement les secours de son ministère à de nombreux blessés sous le feu, en même temps qu’il réconfortait sans cesse tout son entourage par sa parole ardente, l’élévation de ses idées, son courageux sang-froid dans les circonstances les plus critiques. Estimé et aimé de tous. Le 4 novembre 1918, a été grièvement blessé en première ligne, à l’âge de cinquante-huit ans, alors qu’il parcourait les positions du régiment d’infanterie auquel il s’était particulièrement consacré depuis deux ans ». Le jour même, il expire à La Neuville-aux-Joûtes.
[1] Acte de naissance n°16 de Jean Lagardère du registre des naissances de l’année 1860 de Couthures-sur-Garonne, Archives départementales du Lot-et-Garonne, 4 E 74 9.
[2] Florence Rochefort, « La revue La Femme contemporaine, quel féminisme catholique ? » dans Anne Cova et Bruno Dumons (éd.), Femmes, genre et catholicisme, Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes, 2012, p. 121-134.
[3] Excelsior, 12 novembre 1915.
[4] L’Action française, 8 juin 1919.
[5] L’Illustration, planche 134.
[6] Pauline Beaufort, L’Âme héroïque d’un prêtre. Vie de l’abbé Jean Lagardère, Mgr Joseph-Marie Tissier (préf.), Paris, Lethielleux, 1926, p. 228-229.
[7] Livre d’or du clergé et des congrégations (1914-1922), Paris, Bonne Presse, tome 2, 1925, p. 20-21.